Yoann THOMMEREL, Mon corps n’obéit plus, NOUS disparate, décembre 2016
« Dans pas longtemps, mon corps sera une clameur, mon corps sera un million », Yoann Thommerel, Mon corps n’obéit plus.
Dans la plupart des foyers d’aujourd’hui, il y a un salon, et dans le salon, devant le canapé, il y a une table basse ; pour boire l’apéritif en mangeant des cacahuètes en regardant des séries à la télé ; par exemple.
Chez moi aussi il y a un salon, un canapé, bleu, et une table basse ; il y a même deux tables basses ; une rouge et une noire ; la rouge est plus petite que la noire, elle est donc rangée sous la noire. Sur la noire, je bois l’apéritif, je ne mange pas de cacahuètes, c’est mauvais pour ma santé, je me fiche un peu de la vôtre, je préfère la mienne, c’est humain.
La table rouge est pleine de livres ; par la vitre de la noire, en transparence, on les aperçoit.
Dans le tas, au-dessus du tas depuis quelques jours, le livre de Yoann Thommerel, que j’ai lu il y a déjà plusieurs mois. Qui a atterri chez moi par des voies occultes, dont je tairai le nom et le prénom, car c’est une personne très très importante du milieu du livre, dont on ne parle jamais assez, et d’ailleurs pas du tout. Mais je vous jure que lorsqu’elle ne sera plus là où elle est, on verra le manque nom de Dieu, comme les trous dans les mains du Christ dans les bras de Marie-Madeleine ; c’est sûr.
Les plus fins l’auront compris : une fois de plus, le style de l’auteur que je me propose de louer, – ici, on aime, on pratique pas l’éreintement ; enfin, pas trop, un peu tout de m’aime – le style de l’auteur que je me propose de louer, disais-je, transpire sur/dans le mien ; j’aurais mieux fait d’écrire « m’influence », mais, voyez-vous, je me suis dit que j’allais écrire ma petite chronique au kilomètre, sans m’arrêter. Et pour l’instant, je tiens parole.
Thommerel, c’est du bon ; un poète ; un drôle ; un inventif ; un typographe un peu graphiste, un peu beaucoup. La mise en pages de son petit livre est une merveille de trouvaille toute simple et juste. Bon, je tiens toujours la perf.
Un temps d’arrêt. Comme un setter irlandais gordon feu ; pour voir d’où vient le vent de la phrase.
Dans le Thommerel, il y a toutes sortes d’assertions un peu folles, faussement parano, vraiment superbes.
Bon, je m’arrête ; je sens que la panne est proche.
Lisez le Thommerel, mon corps n’obéit plus.
En quatrième de couverture, on apprend que : » Yoann Thommerel est né en 1979, qu’il est l’auteur de Trafic (Les petits matins, 2014). Ses textes, lorsqu’il ne les porte pas lui-même (lectures, performances), sont régulièrement mis en scène au théâtre « .
Voilà tout est dit.
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Un petit extrait de : « Mon corps n’obéit plus »
il dit qu’il pourrait commencer par bégayer,
pour voir, mon corps va bégayer,
pour augmenter les mots,
pour se démultiplier,
pour exister plus,
mon corps va proliférer,
mon corps va parler des langues,
il va sortir de lui,
mon corps va sortir de son corps,
mon corps va sortir de ma langue,
mon corps va s’amplifier,
il va déborder,
mon corps va franchir la ligne,
dans pas longtemps mon corps sera une clameur,
mon corps sera un million,
il va nous déborder pour nous sortir de là,
c’est promis.
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