Je poursuis ma (re)découverte de l’oeuvre de Kafka (Voir les liens en fin d’article).
Les nouvelles et autres textes courts ‒ 34 en tout, dont certains ne dépassent pas une page ‒ rassemblés dans ce livre, constituent, nous rappelle Bernard Lortholary, l’essentiel de l’oeuvre que Kafka envisageait de « présenter au public », donc de publier. La plupart de ces textes fut publiée du vivant de l’auteur.
« C’est donc là-dessus d’abord et surtout qu’il convient de juger l’écrivain, si du moins c’est à l’écrivain qu’on s’intéresse », Or, souligne Bernard Lortholary « tel ne paraît pas être l’intérêt dominant chez les innombrables commentateurs de Kafka, (…), c’est bien plutôt le sens de l’oeuvre, le contenu des textes, la pensée de Kafka qui font l’objet des travaux universitaires, mais également des articles et essais des écrivains et des critiques » (Préface, page 11).
C’est probablement a fortiori la rançon du génie : chaque laudateur ou commentateur, suivant son inclination naturelle, ne peut s’empêcher de projeter sur ledit génie, ou sur son œuvre, ce qui l’intéresse lui, ce qui lui plaît à lui. Franz Kafka, comme tant d’autres écrivains avant et après lui, en fait les frais.
En ce qui me concerne, depuis que j’ai appris, l’ayant lu ici et là, que dans l’oeuvre de Kafka, il y avait de l’humour, je ferais presque une fixation là-dessus !
Et d’ailleurs, en lisant l’excellente préface de Bernard Lortholary à ces textes de Kafka, je lis à nouveau : « Un autre trait commun à tous ces textes et plus constant, c’est l’humour, cet humour de Kafka auquel on pourrait croire que les commentateurs sont assez insensibles » (page 17).
C’est, en effet, plutôt mon cas. Si Kafka riait, à ce qu’il paraît, en lisant le début de son Procès, pas moi !
Ou encore (page 18) : « s’il y a de l’absurde chez Kafka, c’est d’abord et surtout et partout sous la forme de la cocasserie parfois quasi-burlesque qui réside du non-sens ».
Et aussi : « les voies qu’emprunte l’humour chez Kafka ; ce sont les voies d’un comique quasi théatral » (toujours page 18).
Soit.
J’ignore si cela permettra de clarifier la question ou de l’obscurcir (ce qui est bien aussi), mais Arthur Schopenhauer, pour sa part, dans son traité de philosophie, distingue l’humour de l’ironie en ces termes :
« quand la plaisanterie se dissimule derrière le sérieux, en résulte alors l’ironie. », Arthur Schopenhauer, Le monde comme volonté et représentation, Gallimard folio essais, page 1298. Voir ici.
« L’inverse de l’ironie serait, par conséquent, le sérieux dissimulé derrière la plaisanterie. On le nomme humour. », page 1299
Ce que j’aimerais souligner, pour ma part, c’est d’abord et surtout et partout, qu’évoquer l’humour chez Kafka, me paraît donc toujours un peu court ; pire, inexact.
Humour noir me semblerait déjà mieux, quoique encore insuffisant. Humour caustique, ou mieux encore : ironie, au sens où l’entend Schopenhauer dans son traité, me semble finalement le plus adapté.
Nous parlerons donc désormais de « l’ironie de Kafka » !
Bien au-delà de l’humour et de l’ironie, nous trouvons chez Kafka je pense, beaucoup d’orgueil blessé peut-être ? Et qui sait, et d’abord et surtout et partout, et avant tout – la peur, et aussi la frustration ? Celles de ne pas réussir à écrire comme il le voudrait…
De là certainement la fâcheuse décision que Franz Kafka exprima dans ses dernières volontés, et que chacun connaît : tout brûler.
Vous l’aurez compris : c’est mon Kafka à moi, et il me ressemble ! Je lui donnerais volontiers mes propres doutes, s’il me prêtait un peu de son génie !
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En ce qui concerne le Journal, Voir ici
Pour Amérique, Voir ici
Et enfin, mis en ligne récemment, pour les Lettres à Milena Jesenska, Voir ici
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